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À CONSULTER RÉGULIÈREMENT
RETOUR D'UN ARTICLE
Lana
__________________
Avant d’introduire la notion d’objet intermédiaire, il faut avant déterminer ce qu’est un réseau de coopération scientifique. L’article cite trois définitions valables, mais dans le cadre de cet article, un réseau serait défini comme un ensemble d’acteurs scientifiques, qui sont reliés les uns aux autres par les flux d’informations qu’ils s’échangent et par les contacts qu’ils ont entre eux. C’est un lieu propice à la naissance de relations entre des réseaux hétérogènes en termes de disciplines scientifiques et d’appartenance organisationnelle (publique et privée, scientifique, clinique et industrielle).

Et au sein des réseaux de recherches scientifiques, on peut distinguer cinq types de réseaux, selon la nature des liens, des activités et des liens sociaux qu’ils entretiennent avec les objets intermédiaires (réseau-forum, réseau d’échange, réseau de production de résultats scientifiques communs, réseau d’échange fixe, réseau de type industriel)

Concernant les objets intermédiaires, on en distingue deux types:
- intermédiaire fixe : c’est une entité physiques qui ne bouge pas, et ce sont
les chercheurs qui circulent autour de l’objet (ex: tableau noir dans une salle
de classe) ;
- intermédiaire circulant : c’est une entité physique qui est envoyée
d’un acteur à l’autre (ex: cadeau, bulletin de liaison)

Dans cet article, on appelle objet intermédiaire les programmes, les projets, les protocoles et les présentation de problématiques à débattre. L’objet intermédiaire permet donc dans un premier temps de distinguer plusieurs types de réseaux, mais aussi dans un second temps de révéler la dynamique collective qui précède la rencontre avec l’objet :
1) Tout d’abord, le réseau est informel et hétérogène. Il y des échanges
d’idées, mais les liens sont faibles, et il n’y a pas de coordination dans
la recherche.
2) Dans un deuxième temps, les équipes du réseau informel doivent se
mobiliser pour élaborer les objectifs, les tâches et la problématique
communs. C’est dans cette étape qu’un objet intermédiaire intervient dans
les relations pour structurer les activités en imposant des contraintes, qui
ne sont pas pour l’instant remises en question par les chercheurs.
En fait, l’objet sera reconfiguré ensuite car il n’a pas la même signification
selon le rôle des équipes de recherches. C’est une étape importante dans
la recherche parce que c’est l’objet qui structure et polarise l’action collective
autour de lui.
3) Enfin, les équipes arrivent enfin à se formaliser autour d’un objet
en commun, qui permet aux équipes de s’ajuster les unes par rapport
aux autres.

Dans cette dynamique collective, on note une opposition entre un objet intermédiaire commissaire, qui véhicule l’intention sans la transformer, et un objet intermédiaire médiateur, qui ajoute ou retire quelque chose à l’action et modifie son cours, et qui admet son statut de co-auteur. L’objet intermédiaire permet de construire des réseaux et des conditions d’un travail scientifique coopératif et donne naissance à un flux qui participe à la construction d’un système, c’est-à-dire que réseau scientifique va s’articuler et s’orienter selon l’objet intermédiaire.

Les objets sont construits à travers des chaînes d’interactions associant trois composantes d’une médiation :
- intentionnalité : Qui mesure la présence ou non d’une intention par rapport
à une caractéristique donnée de l’intermédiaire. Par exemple, il n’y a pas
d’intention derrière un objet intermédiaire commissaire car les chercheurs
n’ont pas cherché à problématiser leur rapport avec lui, ils sont victimes
de la sédimentation de l’objet
- cadrage, ou les moyens mis à disposition des usagers : Qui montre
la prévisibilité ou non de l’action de l’intermédiaire. Lorsqu’il est prévisible,
l’objet est un vecteur et un commissaire, mais lorsqu’il est imprévisible,
il est actif
- usage : Qui montre la prévisibilité de l’action de l’utilisateur.
Une intermédiation ouverte rend possibles plusieurs usages, mais quand
elle est fermée, le comportement de l’usager est contraint et prévisible.

Les objets intermédiaires ont donc plusieurs rôles :
- être à l’origine des interactions locales et une dynamique collective
prouver le passage d’une étape à une autre, l’évolution ou un changement
de la vie du réseau (cela prend la forme d’une terminologie commune,
d’un protocole de collecte de données, de formulaires correspondantes,
d’un logiciel de saisie de données, de formulaires, d’une base de données)
- offrir des perspectives mais limiter les possibilités d’action (ex: limiter
la prolifération des interactions simultanées)
- représenter les problématiques et montrer des solutions concernant
la médiation entre les équipes de chercheurs, qui ont différents langages,
fonctionnements et objectifs

Ce dernier point est sûrement le plus important car il peut être mis en parallèle avec le projet actuel, il remet en question le lien qu’on a avec les objets qu’on conçoit. À l’issu de cette lecture, je retiens donc ces points :
avoir conscience qu’un objet a des sens qui varient selon les usagers
prendre conscience de toute la dimension et complexité sociale entourant un objet
l’objet est une entité médiatrice, il faut comprendre comment coopérer avec elle, et non la dompter

- Lana Khong
6 février 2023
UTILISER LA NOTION D’OBJET INTERMÉDIAIRE POUR ÉVALUER UN JEU UTILE

Un rôle de l’objet intermédiaire est de construire un système (un réseau scientifique coopératif par exemple) qui s’articule autour de lui. Il existe sous trois composantes, et il serait intéressant de les mettre en parallèle avec un exemple de jeu utile (1), à savoir Jeu Serai (2).

La première composante est la présence ou non d’une intention. Dans Jeu Serai, le joueur.se pense contrôler ses actions et n’être influencé.e par rien. Cependant, ce comportement est une intention de la part du créateur du jeu: le joueur.se est alors victime de la sédimentation de la mécanique du jeu, et son comportement a été prévisible par la mécanique. La deuxième composante est le nombre de moyens mis à disposition des usager.es, qui montre la prévisibilité ou non de l’action de l’intermédiaire (3). Dans Jeu serai, l’action du joueur.se est prévisible par le mécanisme d’interrogation directe, qui ne laisse qu’un à six choix de réponses à une question. De ce fait, les moyens mis à disposition du joueur.se rendent l’action très cadrée, et l’engagent à avoir un comportement prévisible, semblablement à un objet intermédiaire commissaire. Enfin, la troisième composante est l’usage, qui montre la prévisibilité de l’action de l’utilisateur (4). Dans le cas du système du jeu utile, le comportement du joueur.se est délimité par des règles : elles donnent certes la possibilité au joueur.se de faire des choix, mais qui sont contraints et prévisibles. C’est donc une intermédiation fermée. De ce fait, lorsque l’article cite “Jeu Serai vise à développer un outil personnel qui procure à un individu […] le moyen de travailler ce projet [son parcours professionnel] à sa convenance” (5), c’est faux car la mécanique du jeu, par le fait de cadrer le comportement du joueur.se, ne le rend pas imprévisible. En effet, la seule “liberté” du joueur.se est d’avoir le choix entre des réponses déjà pré-définies.

Jeu Serai peut être, ici, considéré comme un objet intermédiaire car il offre certaines perspectives tout en limitant les possibilités d’action, notamment pour éviter l’émergence d’interactions simultanées. Par la démonstration faite plus tôt, il tend à montrer que c’est un objet intermédiaire commissaire, mais on peut se demander si ce statut est adapté pour un jeu qui se veut analyser la psychologie humaine (entre autres) pour déterminer des choix d’orientation d’élèves.

Ce qui pourrait être intéressant à exploiter pour améliorer ce jeu est qu’il réponde à la caractéristique la plus importante (selon moi) de l’objet intermédiaire, à savoir la prise en compte des différents langages, fonctionnements et objectifs que ce jeu peut avoir pour les différentes parties (concepteur.ice du jeu, joueur.se, conseiller.e pédagogique), car un objet a des sens qui varient selon les usager.es. Cela passe par la prise de conscience de la dimension et complexité sociale entourant la problématique de l’orientation professionnelle. Emmanuel G. & Co (6). en sont également arrivés à cette même conclusion, et proposent de remplacer le mécanisme d’interrogation directe par une analyse plus complexe et juste des choix dans des situations de jeu (grâce à la psychologie sociale, cognitive, développementale et différentielle). Cela situerait ce jeu utile non plus comme un objet dompté, mais comme un outil de médiation avec lequel le conseiller d’orientation coopère. Un second changement serait de prendre en compte le processus d'orientation traditionnel en permettant au joueur.se de rédiger une “mémoire interactive et multimédia”, constituée d’éléments visuels ou sonores qui traduisent ses souvenirs personnels. En d’autres termes, au lieu d’imposer au joueur.se des choix directes pour lui créer un récit de vie qui ne lui correspondrait pas, il faudrait que l’intermédiation soit ouverte (plusieurs usages du jeu possibles) et que le cadrage du jeu soit imprévisible (avec plus de moyens mis à sa dispositions), pour qu’il devienne réellement personnel. Enfin, le dernier point cocherait un autre rôle de l’objet intermédiaire, à savoir être à l’origine d’interactions locales et une dynamique collective. Pour Jeu Serai, cela se traduirait pour Emmanuel G. & Co (7) par “un mode de communication souple et individualisé entre l’utilisateur et le conseiller d’orientation en utilisant les mécanismes développés dans les jeux en ligne et les réseaux sociaux”.

En somme, pour concevoir un jeu utile, il serait pertinent de s’appuyer sur les différents rôles de l’objet intermédiaire. L’objectif d’un jeu utile ne serait évidemment pas de répondre à toutes les caractéristiques d’un objet intermédiaire médiateur, même si ce dernier semble plus pertinent qu’un objet intermédiaire commissaire dans ce cadre. Mais pour le concepteur, il est important de comprendre la problématique que le jeu doit traiter avant de faire un choix de mécanique. D’ailleurs, il serait d’ailleurs pertinent de vérifier quelles composantes et rôles de l’objet intermédiaire sont mobilisés lors de la mise en place d’une mécanique du jeu utile, pour mesurer sa pertinence vis-à-vis de la problématique.

- Lana Khong


Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération scientifique. Contribution à la prise en compte des objets dans les dynamiques sociales, Dominique Vinck, 1999
Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération scientifique. Contribution à la prise en compte des objets dans les dynamiques sociales, Dominique Vinck, 1999

Du jeu utile au jeu sérieux (serious game), Le projet Jeu Serai, Emmanuel Guardiola, Stéphane Natkin, Delphine Soriano, Even Loarer, Pierre Vrignaud, Thierry Boy, Odile Dosnon, Dans Hermès, La Revue 2012/1 (n° 62), pages 85 à 91
22 février 2023
(1) Dans un jeu utile, je suis partie du principe que le "l'objet intermédiaire" est la mécanique du jeu

(2) Le but de Jeu Serai est d'outiller et de faciliter le travail d’orientation mené conjointement par un.e conseiller.e d'orientation qui accompagne un.e élève. L'objectif est de faciliter l'identification des principales caractéristiques individuelles sur lesquelles se fondent les choix d’orientation.

(3) S’il est prévisible, l’objet est commissaire, et s’il est imprévisible, alors il est médiateur.
(4) Lorsque l’Intermédiation est ouverte, alors plusieurs usages sont possibles. Lorsqu’elle est fermée, le comportement de l’usager est contraint et prévisible.
(5) Du jeu utile au jeu sérieux (serious game), Le projet Jeu Serai, Emmanuel Guardiola, Stéphane Natkin, Delphine Soriano, Even Loarer, Pierre Vrignaud, Thierry Boy, Odile Dosnon, Dans Hermès, La Revue 2012/1 (n° 62), pages 85 à 91, paragraphe 8.
(6, 7) Emmanuel Guardiola, Stéphane Natkin, Delphine Soriano, Even Loarer, Pierre Vrignaud, Thierry Boy, Odile Dosnon
BASE D'EXEMPLES DE PROJETS
Nina